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Le directeur artistique du Centre Gogol assigné à résidence

Le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov a été assigné mercredi à résidence par un tribunal de Moscou. © KEYSTONE/AP/ALEXANDER ZEMLIANICHENKO
Le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov a été assigné mercredi à résidence par un tribunal de Moscou. © KEYSTONE/AP/ALEXANDER ZEMLIANICHENKO


Publié le 23.08.2017


Le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov a été assigné mercredi à résidence jusqu'à octobre par un tribunal de Moscou. Il a été inculpé dans une affaire de détournement de fonds publics qu'il qualifie d'"absurde".

L'avocat du réalisateur et directeur artistique du réputé théâtre contemporain moscovite Centre Gogol a aussitôt annoncé son intention de faire appel de cette décision. Celle-ci le bloque à son domicile - sauf accord spécial des forces de l'ordre - alors qu'il se trouvait en plein tournage d'un film et qu'il devait monter prochainement un opéra à Stuttgart.

"Serebrennikov pourrait s'échapper et exercer des pressions sur les témoins", a expliqué la juge Elena Lenskaïa. Son assignation à résidence s'applique jusqu'au 19 octobre mais elle peut être prolongée, comme c'est souvent le cas le temps de la préparation des procès.

Intimider les artistes?

Des centaines de personnes réunies près du tribunal Basmanny à Moscou pour soutenir le réalisateur de 47 ans, soupçonné d'avoir détourné l'équivalent d'un peu plus d'un million d'euros de subventions, ont accueilli la décision en scandant "Honte!".

Certains, dans les milieux artistiques ou de l'opposition, ont dénoncé une affaire directement orchestrée par le Kremlin visant à intimider les artistes à l'approche de la présidentielle.

Metteur en scène réputé dans le milieu théâtral européen et cinéaste aux films présentés aux festivals de Cannes ou de Venise, M. Serebrennikov n'est pas ouvertement un opposant à Vladimir Poutine. Il critiquait cependant les pressions croissantes exercées sur la création artistique sous prétexte de promotion des valeurs conservatrices et ses oeuvres, abordant des thèmes comme la politique, la religion ou la sexualité, étaient régulièrement critiquées des activistes orthodoxes ou des autorités.

En juillet, le Bolchoï avait annulé quelques jours avant la première un ballet mis en scène par M. Serebrennikov consacré à Rudolf Noureev, danseur soviétique réfugié en France en 1961 et mort du sida en 1993, assurant que le spectacle n'était pas prêt.

"Impossibles et absurdes"

Interpellé dans la nuit de lundi à mardi sur le tournage de son film à Saint-Pétersbourg, il a été inculpé mardi pour "fraude à grande échelle", un délit passible de dix ans d'emprisonnement.

Selon les enquêteurs, le réalisateur est soupçonné d'avoir, par un système de devis et factures gonflés, détourné 68 millions de roubles (plus d'un million de francs au taux actuel) entre 2011 et 2014 sur des subventions de 214 millions de roubles accordées au projet "Plateforme" réalisé par son précédent théâtre, le Studio-7.

"Ces accusations sont impossibles et absurdes", a estimé M. Serebrennikov devant le tribunal. "L'argent octroyé par l'Etat pour le projet 'Plateforme' a été dépensé pour ce même projet".

M. Serebrennikov, qui a passé une première nuit en cellule, avait demandé sa libération, lors de l'audience. "Je n'ai aucune intention de m'échapper", avait plaidé le metteur en scène. Son avocat Dmitri Kharitonov avait proposé le paiement d'une caution record égale à la somme que la justice accuse le metteur en scène d'avoir détourné, soit 68 millions de roubles.

ats, afp

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