La Liberté

Suisse-UE: L'UDC envisage de résilier l'accord de Schengen via une initiative

L'UDC va discuter de réintroduire des contrôles systématiques aux frontières suisses. Ses délégués décideront le 25 mai à Bâle du lancement d'une "initiative pour la protection des frontières". Sa mise en oeuvre serait en contradiction avec l'accord de Schengen.

Suisse-UE: L'UDC envisage de résilier l'accord de Schengen via une initiative © Keystone- photo prétexte
Suisse-UE: L'UDC envisage de résilier l'accord de Schengen via une initiative © Keystone- photo prétexte

ATS

Publié le 20.05.2024

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Le peuple et les cantons ont approuvé en 2005 l'association aux accords de Schengen et Dublin, qui concernent la libre circulation et l'asile. Ces accords sont entrés en vigueur il y a quinze ans.

Depuis l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, le 31 mars dernier, l'espace Schengen compte 29 Etats membres - 25 pays de l'Union européenne et les quatre de l'Association européenne de libre-échange (Suisse, Norvège, Islande et Liechtenstein). Selon Bruxelles, 425 millions de personnes y vivent.

Les deux derniers pays n'avaient jamais été complètement intégrés. Seuls les contrôles aux frontières aériennes et maritimes avaient été supprimés. Ils étaient en revanche maintenus aux frontières terrestres.

Suppression des frontières intérieures

L'accord de Schengen a été signé en 1985 dans la ville luxembourgeoise éponyme par l'Allemagne, la France, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. Il a pour objectif principal de supprimer les contrôles aux frontières intérieures. Des contrôles n'ont lieu qu'aux frontières extérieures de l'espace Schengen.

L'accord de Dublin concerne, lui, le domaine de l'asile. Il prévoit qu'un requérant d'asile ne peut déposer une demande d'asile que dans un seul pays membre de l'espace Dublin. La Suisse peut donc renvoyer une personne qui a déjà déposé une demande d'asile dans un pays de cet espace vers cet Etat. L'accord vise notamment à éviter que deux Etats examinent en même temps la même demande d'asile.

Contrôles systématiques exigés

L'initiative soumise aux délégués de l'UDC réclame le rétablissement de contrôles systématiques aux frontières helvétiques, avait annoncé le parti en janvier.

Le texte exige aussi que les personnes qui sont arrivées en Suisse via un pays jugé "sûr" ne soient pas autorisées à entrer sur le territoire suisse et à y déposer une demande d'asile. Il veut enfin fixer un contingent maximal de 5000 demandes d'asile par année.

Des contrôles systématiques aux frontières ne sont toutefois pas compatibles avec l'accord de Schengen. Celui-ci prévoit uniquement une réintroduction temporaire de ces contrôles en cas de danger pour la sécurité intérieure.

A la mi-mai, huit Etats avaient eu recours à cette possibilité, selon le site internet de la Commission européenne. La plupart l'avaient justifié par un danger terroriste ou à cause de la pression migratoire. L'Allemagne prévoit ainsi de mener des contrôles à la frontière suisse jusqu'au 15 juin.

Risques pour l'économie

Le Conseil fédéral a commandé il y a plusieurs années un rapport sur les conséquences économiques et financières d'une résilation des accords de Schengen et Dublin.

Ce document, présenté en 2018, indiquait que renoncer à ces accords coûterait très cher. Selon les variantes étudiées, l'économie subirait à l'horizon 2030 une perte de revenu annuelle située entre 4,7 et 10,7 milliards de francs, soit un recul de 1,6% à 3,7% du Produit intérieur brut (PIB).

Les collectivités publiques verraient leurs charges augmenter, essentiellement dans le domaine de l'asile. Sans accès aux banques de données de la coopération policière, la Suisse serait aussi confrontée à des lacunes de taille en matière de sécurité intérieure.

Un précédent

Une initiative de l'UDC avait déjà provoqué par le passé des frictions entre la Suisse et l'UE. Le peuple suisse avait accepté le 9 février 2014 l'initiative "contre l'immigration de masse", un texte en contradiction avec le principe de libre circulation des personnes selon la Commission européenne.

Bruxelles avait réagi rapidement en gelant les négociations en cours avec la Suisse sur sa participation aux programmes européens de l'époque tels que les programmes de recherche ("Horizon 2020"), de formation ("Erasmus") et culturel ("Europe créative").

Le Conseil fédéral et les Chambres avaient finalement opté pour une mise en oeuvre modérée de l'initiative, en donnant la priorité aux travailleurs indigènes. La nouvelle loi est entrée en vigueur à la mi-2018.

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11